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Frederick George Scott

Chaplain, 1st CEF Division

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Frederick George Scott

Frederick George Scott est né à Montréal en 1861. Il fut ordonné prêtre de l’église anglicane en 1886 et entre 1896 et 1934 il exerça son ministère à différents niveaux à Québec. Marié et père de six enfants, il n’hésita pas dès le début de la guerre à partir comme aumônier principal de la 1st Division. Il avait alors 53 ans et il relata ses souvenirs aussi bien dans de nombreux poèmes que dans un livre :  " The Great War as I saw it ". Il eut la peine de perdre l’un de ses fils durant la bataille de la Somme en 1916 et arpenta le champ de bataille pour retrouver son corps et lui donner une sépulture. Aimés des soldat qui le surnommèrent " Père bien aimé " il termina la guerre avec une blessure, la CMG et la DSO. Il devint par la suite aumônier en chef des forces canadiennes en Europe avant de regagner son pays où il mourut en 1944.

Extrait de " The war as I saw it " Canon Scott, The Clarke & Stuart CO. Limited, 2e édition, Vancouver 1934. Récit de la bataille d’Amiens le 8 août 1918.

(…) Le barrage était prévu à 4H20, je les laissai donc vers 4H10 pour regagner le PC du bataillon car j’avais l’intention de suivre la progression avec les brancardiers. Sur le chemin du retour je croisai le colonel, son ordonnance et son piper, ce dernier devait être tué peu après au cours de l’attaque. Je leur serrai la main et le colonel me dit : " Canon si quelque chose devait m’arriver ne faites pas de chichis ; mettez-moi dans un trou d’obus et dites seulement une prière." Je lui répondis : " tout ira bien colonel, il n’y aura pas de trou d’obus pour vous." Puis, en tant que supérieur il m’ordonna de regagner les tranchées. Je lui répliquai que j’aurais aimé partir à l’assaut avec lui mais il ne voulut rien entendre. Quand j’arrivai aux tranchées il ne restait que quelques minutes avant le début du barrage. Je m’installai sur le parapet et attendis en scrutant l’obscurité. C’était un instant délicieux. Quand les fusées allemandes s’élevaient on pouvait distinguer un bois sur la pente opposée de la vallée et son contour devenait plus distinct dans le petit matin gris. A droite et à gauche je distinguais de larges parties d’une pente qui s’élevait et se perdait dans les ténèbres. Par moment quelques obus s’abattaient derrière nos lignes tandis que nos canons restaient parfaitement muets. Que signifiait ce calme de la part de l’ennemi ? Les Allemands avaient-ils éventés nos plans ? Avaient-ils ramassés leurs forces comme le lion prêt à bondir sauvagement au premier mouvement ? Toutes nos précautions avaient-elles été vaines ? Etions-nous à l’aube d’une victoire qui allait percer l’armure du monstre ? C’était l’un de ces moments magnifiques de la guerre qui remplissait l’âme d’un délice étrange et sauvage. Nous avions préparé cet événement durant des mois et maintenant le moment tant attendu était arrivé. Le ciel s’éclaircissait et la constellation des Pléiades commençaient à s’estomper à la cime des arbres. Je jetai un coup d’œil sur ma montre. Insensiblement les aiguilles se rapprochaient de l’heure H, le temps paraît bien long dans ces moments-là. Soudain à 4H20 le barrage se déchaîna. Le sifflement de la pluie d’obus sur un front de 25 km accompagnait le rugissement incessant des milliers de canons qui firent entendre leur musique sauvage au quatre coins de la planète et ne cessèrent que lorsque les églises du monde civilisé carillonnèrent joyeusement pour annoncer l’Armistice.

Les fusées multicolores allemandes s’élevèrent pour réclamer de l’aide et de temps à autre une lueur rouge embrasait le ciel nous indiquant qu’un dépôt de munitions venait d’être touché. Le grondement nous secouait la poitrine et était encore plus vivifiant que celui de Vimy. J’étais tellement pris par cette atmosphère que je ne pus m’empêcher de m’écrier : " gloire à Dieu pour ce barrage ! " Les Allemands répliquèrent mais faiblement pour notre plus grand bonheur et nous sûmes alors que nous les avions surpris et que c’était notre heure.

Un bruit étrange nous fit retourner et nous vîmes les tanks escalader la pente tels d’énormes coccinelles grises. Nos hommes parvinrent de justesse à en dérouter un qui menaçait d’arracher nos fils téléphoniques. Le 5th Bn sortit des tranchées et j’emboîtai le pas aux brancardiers descendant le versant. Le bois à travers lequel couraient les lignes allemandes sur le versant opposé de la vallée s’appelait le Bois de Hangard. Ici où là gisaient des blessés ou des tués des 13th et 16th Bn dans les blés mûrs et les brancardiers se mirent au travail. Un sergent me suivait et nous longeâmes le bois à la recherche de blessés jusqu’à ce qu’il se fût emparé d’une mitrailleuse et de plusieurs pistolets allemands. Le blé avait été couché par les hommes au cours de leur charge mais il était encore assez haut pour dissimuler un corps prostré. A ce moment l’attaque débouchait du bois et l’ennemi s’enfuyait. L’artillerie allemande concentrait maintenant ses feux sur la vallée qui se remplit d’épaisses fumées. Il était impossible de voir à quelques pas. Nous entendions l’explosion des obus autour de nous mais sans pouvoir distinguer les impacts. Le soleil s’était levé mais nous perdîmes notre chemin dans la brume, nous ne distinguions plus les explosions amies ou ennemies.

Alors que j’avançais j’arrivais devant un vaste trou d’obus qui semblait dater d’une autre bataille. Sur le bord se trouvaient trois Huns qui paraissaient morts. Je me penchai pour voir comment ils avaient été tués, les corps n’étaient pas en bouillie. Je pensai qu’ils avaient dû être tués par le souffle de l’explosion mais l’un d’eux bougea la main. Je criai " Kamarad ! " et à mon grand amusement les trois se mirent sur le dos et levèrent les bras en disant : " Kamarad ! Pitié ! Pitié ! " C’était très comique que ces trois-là me demandent d’épargner leurs vies. Je leur demandai dans mon meilleur Français  de se lever et de me suivre tandis que j’appelai le sergent : " sergent, j’ai fait trois prisonniers. " Mon désir de capturer un prisonnier était un sujet permanent de blague parmi nos hommes. Quand ils partaient au combat j’avais l’habitude de proposer 25$ pour un petit Allemand que je pourrais capturer moi-même et je leur précisais bien de ne pas en prendre un gros car cela aurait pu passer pour un pêché d’orgueil pour un aumônier. Là, il y en avait trois prêts à se rendre sans rien avoir à débourser. Nous formâmes une étrange procession à travers le fumée ; le sergent était en tête, j’étais à l’arrière et entre nous deux les trois prisonniers terrorisés s’accroupissaient à la moindre explosion un peu trop proche. Finalement nous buttâmes sur une Cie du 2nd :  " les gars, j’ai gagné 75$ dans un trou d’obus ! " Nos vaillants Canadiens s’emparèrent des trois infortunés qui semblaient s’attendre à avoir la gorge tranchée et ayant eux-même vidé leur poches, arrachés boutons et pattes d’épaules, ils m’en donnèrent une en souvenir. Quand les prisonniers purent être emmenés avec d’autres sous bonne escorte je repartis et voyant un tank descendre la pente je me juchai dessus et regagnai la bataille. Nous franchîmes facilement quelques larges tranchées et quand l’engin fit une pause je sautai et poursuivis pour atteindre le sommet de l’autre versant. En haut s’étendaient de vastes espaces couverts de blés jaunes à perte de vue. Ici ou là je croisais des blessés retournant à l’arrière et de nombreux prisonniers. Dans les champs on voyait des fusils piqués en terre qui indiquaient l’emplacement de blessés. Il s’agissait pour la plupart d’Allemands gravement touchés et qui réclamaient de l’eau. Pauvres hommes, j’étais désolé pour eux car pour autant que je pouvais en juger il faudrait pas mal de temps avant de les évacuer ou de les soigner tant notre avance avait été rapide. J’allais de l’un à l’autre et leur donnait à boire l’eau des gourdes que je portais à la ceinture. Je pense que la majorité d’entre eux a dû mourir car ils étaient blessés au ventre. Après avoir fourni autant que je le pouvais des soins aux corps je m’occupais de leurs âmes. Comme ils étaient catholiques, j’ôtai le crucifix de mon cou et leur donnai. Ils voulaient le prendre de leurs mains tremblantes avec amour et l’embrasser tandis que je récitais le Notre Père en Allemand. Cela arriva à plusieurs reprises. L’un deux qui avait une blessure affreuse à l’abdomen fut très reconnaissant et quand il me rendit le crucifix il prit ma main et l’embrassa. Etrangement si nous nous étions rencontrés une heure auparavant nous aurions été des ennemis mortels. A un carrefour un peu plus loin les Allemands avaient dû concentrer leurs feux sur nos hommes qui gisaient nombreux blessés ou tués.

Le soleil était haut dans le ciel maintenant et il faisait chaud mais les champs étaient beaux et comme il n’y avait aucune haie les pentes paresseuses donnaient une impression d’immensité et constituaient un endroit idéal pour une bataille de cette envergure. Pendant que je prenais soin des blessés j’entendis les clameurs du 16th qui avait atteint son objectif et qui pouvait maintenant se reposer et se restaurer. J’allai vers eux et trouvai le colonel très content du travail de ses hommes. C’était une belle déroute pour l’ennemi. Les bataillons des 1st et 2nd brigade avaient suivi l’attaque et passaient maintenant en tête. Je les suivis. C’était un sentiment délicieux de marcher sous le ciel bleu dans ces blés magnifiques qui étaient encore en territoire ennemi il y a peu. C’était comme si par notre travail nous étions devenus propriétaires d’un vaste domaine où ce que nous trouvions nous appartenait. Nul doute que ce sentiment habite les colons. De la colline où je me trouvais j’avais une vue magnifique de la cavalerie britannique. Des milliers de chevaux, minuscules car ils étaient loin, galopaient en longues files à travers les champs jaunes et cela rappelait les grandes batailles des temps anciens où les cavaliers jouaient le rôle essentiel maintenant dévolu aux tanks et aux gaz. Ma réserve d’eau était maintenant épuisée mais je pouvais la reconstituer avec les gourdes des tués. La route qui menait de Gentelles à Caix serpentait à travers la vallée en suivant le maigre cours d’eau jusqu’à la droite de notre ligne d’attaque. C’était très étroit et des embouteillages s’y produisaient avec la foule de la cavalerie, les ambulances et l’artillerie. Dans un moulin que les Allemands avaient utilisé comme PC d’artillerie et dépôt d’intendance nos hommes trouvèrent quantité de couvertures, de manteaux et d’autres fournitures utiles. Nos médecins établirent un poste de secours dans les bâtiments et utilisèrent tout cela. Une section de mitrailleurs s’y reposaient et ce fut un grand rafraîchissement que de pouvoir me laver et me raser avec un rasoir emprunté. Nous étions si torturé par la soif que nous bûmes à la rivière bien que de nombreux obus y soient tombés. Notre objectif était encore éloigné de plusieurs kilomètres et je poursuivis donc mon chemin avec la 1st Brigade.

Les Allemands avaient abandonné la partie laissant de nombreux canons et détruisant de grandes quantités de munitions. Un dépôt important était juste à côté de la rivière. De jolis hameaux parsemaient la vallée, nous passâmes dans celui d’Ignaucourt où l’église était endommagée. Par la suite nous établîmes une ambulance dans ce village. J’étais très fatigué par la marche d’aujourd’hui et l’absence de sommeil de la nuit précédente et je fus bien aise d’y prendre un peu de repos avant de gagner Caix dans l’après-midi, objectif final de la 2nd Brigade. Là une ambulance s’était installée dans un bâtiment sur la place mais elle fut bombardée durant la nuit. Le 10th Bn s’était installé dans des tranchées à la sortie du village. J’allai le voir et je trouvai les hommes avec un moral d’acier suite au déroulement de la bataille. La bonne vieille division à l’écusson rouge avait progressé de 14 km en battant ainsi le record de toutes les divisions, tant britanniques qu’allemandes, durant la guerre. C’était maintenant la fin de l’après-midi et aucune autre attaque ne pouvait être lancée. Devant nous, sur une petite éminence, se trouvait Rosières où passait une route parallèle à nos positions. Entre la ville et nous se trouvait une petite cuvette et avec des jumelles on pouvait voir des camions allemands chargés de troupes fraîches roulant dans un nuage de poussière. Ils stoppaient près du village et les hommes sautaient et se ruaient vers des tranchées. Ils semblaient préparer une contre-attaque et la situation était très inquiétante. Un sergent m’informa qu’on manquait de munitions et me demanda d’avertir le colonel. (…) J’allai au PC du Bn qui se trouvait dans une villa à l’extérieur est de Caix. Sur la route se trouvait un poste d’observation de cavalerie où quelques officiers observaient Rosières et l’arrivée des troupes ennemies. Par chance les Allemands ne disposaient pas de canons même si dans la nuit quelques obus tombèrent sur le village. Plus tard quelques batteries de la Royal Horse Artillery et nos canons de campagne scellèrent le sort des Allemands et empêchèrent toute contre-attaque. Un glorieux soleil couchant sur ce territoire nouvellement conquis mis un terme à cette journée de haute lutte et d’une grande portée. Quand la nuit tomba et que les étoiles s’allumèrent dans le ciel tranquille, je pris congé de mes amis cavaliers qui cantonnaient dans un creux sur la droite et je cherchai un endroit pour dormir.

Les caves de la villa occupée par le colonel étaient bondées, j’allai donc vers le village où je suivis quelques hommes qui passaient une porte. C’était le jardin d’un grand bâtiment, probablement une brasserie. Les coureurs du Bn avaient déniché une cave profonde et se l’étaient appropriée. Je leur demandai si je pouvais passer la nuit avec eux. La cave n’était pas spécialement accueillante mais elle était bien profonde et voûtée de briques. Deux bougies brûlaient dans un coin où un caporal établissait la liste des rations pour ses hommes. J’étalai deux sacs à terre vides sur le sol pour éviter les rhumatismes et je me couchai en utilisant mon casque comme oreiller. Les coureurs, à part ceux qui étaient de service, firent de même. Nos pieds se rejoignaient au centre de la pièce et nos corps formaient comme les rayons d’une roue. Quand l’un se tournait et mettait ses pieds de l’autre côté nous devions tous faire de même. Nous entendîmes plusieurs fortes explosions durant la nuit mais nous étions bien installés et relativement protégés. Avant de m’endormir j’assistais admiratif à la discussion à voix basses de deux sous-officiers assis à une table et répartissant entre leurs hommes la tâche du lendemain. Ils ne devaient pas avoir plus de 20 ans mais leur sens des responsabilités et de la justice étaient bien réels. Je pensai que c’était une bonne chose que ces hommes se préparent à devenir des citoyens actifs du Canada. Nous nous levâmes tôt et je me rendis au PC où j’entendis parler d’une attaque qui devait avoir lieu dans la matinée.

Nous devions céder la place à la 2nd Division. Elle devait passer du flanc droit sur le flanc gauche et attaquer Rosières tandis que l’on marcherait sur Warvillers. Depuis le poste d’observation de la cavalerie je pouvais voir à la jumelle le 5th BN montant au front sur une file le long d’une haie. Je pris mon petit-déjeuner dans l’abri des officiers du 7th Bn puis partis rejoindre le 8th qui devait attaquer ce matin. Depuis Rosières des mitrailleuses tiraient sur la route à l’extrémité du bois. Je décidai de ne pas le longer mais plutôt de le traverser et j’arrivai sain et sauf de l’autre côté. J’étais assis sur un tronc et me demandais tout en grignotant si j’arriverais à temps pour l’attaque quand, à mon grand plaisir, je vis arriver quelques troupes en tirailleurs au sommet de la colline. A peine étaient-elles arrivées sur la crête que les mitrailleuses de Rosières ouvraient le feu et que des obus s’abattaient. Les hommes restèrent calmes et personne ne fut touché. Quand ils descendirent dans le bois j’allai les voir. Ils étaient du 22nd Bn et j’y trouvai plusieurs Québécois de ma connaissance.

Je les regardai s’éloigner vers Rosières et repris mon chemin vers nos lignes. Je croisai le 24th qui m’indiqua que la 2nd Brigade était sur la droite. Il y avait le long de la route de nombreuses tranchées abandonnées par les Allemands la veille. Je trouvai un pauvre cheval gravement blessé encore attelé à un fourgon allemand détruit. Je demandai à un de nos gars de l’achever et allai jusqu’à une voie ferrée que je suivis. Les allemands avaient construit là des bâtiments en planches. Ces baraques avaient été criblées de shrapnels et les affaires jonchant le sol montraient avec quelle précipitation ils s’étaient enfuis. Tout près se trouvait un bois et j’appris plus tard que c’était celui de beaufort et qu’on le nommait Hatchet Wood. De petits nuages de poussière ici et là sur la route indiquaient que des balles de mitrailleuses piquetaient le chemin devant moi. Une patrouille de trois cavaliers revenaient du bois le long de la voie et me prirent pour un officier combattant. Le caporal me salua et dit : " ce bois est solidement tenu par des mitrailleuses Sir, nous venons juste d’y pousser une reconnaissance. " Je répondis : " c’est bon, je n’avais pas l’intention de le prendre maintenant. " Je descendis le long de la voie en me demandant où je pourrais bien aller quand je vis un jeune officier du 8th Bn avec ses hommes. Je l’informai que le bois était solidement tenu par des mitrailleuses. Il répondit qu’il le savait et allait l’attaquer de flanc. J’allai donc avec eux jusqu’à l’endroit où ils se couchèrent et mirent les Lewis en position. Je leur donnai la bénédiction et continuait à suivre la voie ferrée. Du côté ouest au sommet d’un talus se trouvait une haie. Là je trouvai le 14th attendant le 8th Bn. Un jeune officier de ce dernier était en train d’agoniser sur le sol. Il dictait une lettre d’adieu à sa femme que je transmis par la suite à l’adjudant. Sur la pente où le 8th Bn avait chargé il y avait de nombreux morts et blessés. Plusieurs agonisaient et je trouvai un pauvre gars qui n’avait jamais été baptisé, je pris de l’eau dans ma gourde et le baptisai sur place. Pour l’instant les brancardiers ne pouvaient les évacuer.

Pendant que je m’occupais des blessés je regardai le bois de l’autre côté de la voie. Il était sur une hauteur et offrait donc une bonne vue sur le coin quand à mon grand étonnement je vis des Allemands quitter leur cachette et courir. Je dévalai la pente en hurlant au 14th BN que les Allemands se sauvaient et un officier vint s’en assurer. Des ordres furent donnés pour attaquer, les hommes traversèrent la voie et s’emparèrent du bois. Dès que je vis que les blessés étaient pris en charge je suivis les troupes et j’eus une nouvelle fois la joie d’avancer en terrain nouvellement conquis.

Dans une ferme de nombreux hommes réclamèrent une pause et là j’appris que le colonel du 8th Bn et plusieurs officiers avaient été tués le matin. Le bataillon devait attaquer une colline de face sous le feu de mitrailleuses lourdes. Quelques tanks étaient à la ferme et l’un des officiers me proposa d’y prendre place mais je devais aller dans le secteur de la 2nd Division et je déclinai la proposition. Chemin faisant je croisai un grand nombre de blessés allemands. L’un d’eux, un jeune gars, était très anxieux quand il me vit m’approcher pensant que j’allais le tuer. Il leva les mains et cria " Kamarad ! " Je pense que les Allemands avaient dû entendre des histoires sur la férocité des canadiens. L’homme commença à m’implorer de l’envoyer vers une ambulance. Il était blessé à la jambe et avait pansé sa blessure du mieux qu’il le pouvait. Je tentais de lui faire comprendre que les brancardiers allaient arriver à temps et je plantai son fusil dans le sol surmonté de son casque pour le signaler.

Avant d’arriver à la fin de la route j’aperçus parmi les troncs le village de Warvillers. De nombreux soldats y convergeaient et je vis notre brigade d’artillerie se mettre en batterie. Je rencontrai deux soldats du 5th Bn et nous partîmes vers le village. L’endroit était maintenant entre nos mains car les Allemands l’avait évacué quelques heures auparavant. Les maisons étaient presque intactes et offraient la perspective d’un cantonnement plaisant. Mes compagnons et moi considérant qu’il était déjà tard décidâmes de prendre notre repas dans un jardin près du château. Nous nous assîmes dans l’herbe et ouvrîmes notre corned-beef en l’accompagnant d’oignons trouvés à proximité. Cela nos amusait de manger quelque chose que les Allemands avaient prévu pour eux. Nous puisâmes de l’eau dans un puit tout proche, elle semblait claire. De l’autre côté du mur on pouvait voir le toit du château. L’un de nous décida d’aller y jeter un coup d’œil et revint au bout de quelques minutes en déclarant que c’était plein d’Allemands. Ils prirent leurs fusils et partirent à l’attaque pensant qu’ils avaient trouvé une poche de résistance ennemie. J’allumai une cigarette après mon repas et quand ils revinrent ils me dirent que c’était nos prisonniers et que le château avait été transformé en poste de secours.
 

Par la suite Frederick George Scott fut évacué du champ de bataille à cause d’une forte fièvre.


Cette traduction n’est pas officielle et ne concerne pas une édition française

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