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Un poète au front

Un hymne douloureux au Santerre martyrisé...

A chés poilus de ch’front d’Picardie

(édité pendant la Grande Guerre)

Is ont bersillé tout ch 'Santerre
Prénd nous qu'vaut, nous vaqu's, nous moissons.
Nous bett'rav's pis nous pommes d'terre
Brûlé nous grang's pis nous moisons.
Sains compter qu'én guise d'couvraines
Rien qu' pour foir' du bruit tant et pus
Is ont enfénouillé nous plaines
D'leus marmit's et pis d'Ieus obus.

De l' ville d' Roye, quoi qu'i n'én reste ?
Ni mi n'én pus. Quoi qu'i rest'ro ?
Pourvu qu'os n'ayons'chs point la peste
Après ch' coeup, ou bien cli' choléro
I s'est foit si cruel carnage
Das tous ches poys d'aléntour,
Qu'o n 'ertrouv'roit mi' sen village
Ses camps ni s 'moison én plein.


Ils ont broyé tout le Santerre
Pris nos chevaux, nos vaches, nos moissons,
Nos betteraves et nos pommes de terre,
Brûlé nos granges et nos maisons.
Sans compter qu'en guise de couvraines
Rien que pour faire du bruit tant et plus
Ils ont encombré nos plaines
De leurs marmites et de leurs obus.

De la ville de Roye, qu'est-ce qu'il en reste ?
Ni moi non plus. Qu'est-ce qu'y restera ?
Pourvu que nous n'ayons point la peste,
Après coup ou bien le choléra.
Il s'est fait si cruel carnage
Dans tous les pays d'alentour
Qu'on ne retrouverait pas son village
Ses champs ni sa maison en plein jour.